Journalisme de solution

11. Le JoSo en images /

Du JT le plus regardé de France aux comptes TikTok les plus déjantés du Midwest américain, le JoSo s’infiltre petit à petit sur tous les écrans….

Comme en radio, le paysage télévisuel est dominé par le journalisme de problèmes (et l’infotainement…). Comme en radio, il y a peu d’émissions dévolues au JoSo. La seule émission spécifique en France, « On a la solution » sur France 3 est assez exemplaire mais elle a une diffusion erratique, tardive et n’est pas toujours accessible sur le web. En revanche, comme en radio de nombreuses émissions sur l’environnement, la citoyenneté ou la vie quotidienne sont à l’antenne, même si elles relèvent souvent des reportages ou des interviews sur les initiatives plutôt que du JoSo stricto sensu.

Heureusement, il y a des programmes pertinents, y compris sur des chaines dominantes…. et aussi des formats innovants sur les nouveaux écrans.

TF1, la chaine des solutions ?

« On ne peut pas faire des journaux qui durent parfois 45 minutes en donnant l’impression que c’est une punition, qu’il ne se passe que des choses graves ».  C’est Cyril Auffret qui dit ça. Alors, le rédacteur en chef des JT du week-end sur TF1, la première et la plus ancienne chaîne de télé en France, programme un véritable quota de reportages JoSo dans les éditions dont il a la charge. Des pharmaciens qui recyclent leurs médicaments invendus aux recettes d’une ville qui relance son économie en passant par les chevaux qui remplacent les camions poubelles, « La France des solutions » fait le tour du problème, dissèque la réponse et affiche les preuves de réussite. Et le tout en moins de deux minutes.

L’écriture télévisuelle de ces reportages passe toujours par « des personnages qui ont cette énergie de vouloir transformer la société » et qui incarnent la solution.

Au-delà de ces rendez-vous du samedi et du dimanche, la chaîne programme aussi du JoSo dans les journaux de la mi-journée avec « SOS Villages », un programme qui permet de reprendre des commerces dans des petits bourgs. Enfin, avec « Une semaine pour l’emploi », TF1 va jusqu’à trouver du travail à ceux qui n’en ont pas. Bref, on peut être une chaine privée et assurer une mission de service public, on peut être un média mainstream et sortir des sentiers battus.

« On a la solution », le magazine écolo-JoSo

« On a la solution ! » est une émission de 52 minutes axée sur l’environnement. Mais le magazine n’aborde pas les grandes politiques pour favoriser la transition énergétique ou les stratégies mondiales pour réduire les gaz à effet de serre, « On a la solution ! » part des problèmes, ou plutôt des besoins concrets des gens.

Par exemple, vous aimeriez passer à la voiture électrique sans en avoir les moyens ? Dans un magazine consacré aux nouveaux modes de mobilités, l’équipe de « On a la solution ! » a réalisé un reportage sur une startup de la ville de Grenoble qui transforme des voitures classiques (et polluantes) en véhicules électrique en changeant le moteur. Pour quelques milliers d’euros, le retour sur investissement de ce « kit électrique » se fait en quelques années. Après le reportage, arrive un entretien, assez fouillé et sans réelle complaisance, avec le fondateur sur le prix (conséquent !), les limites de l’électrique (pas plus de 200 km d’autonomie), la pollution générée par la fabrication des batteries…

La solution est une innovation et son mode d’emploi n’est certes pas reproductible par n’importe quel bricolo. Mais d’autres reportages de cette émission sur d’autres inventions sont plus accessibles comme cette roue électrique que n’importe quel particulier peut poser sur son vélo ou ce système de covoiturage en zone rurale qui fonctionne grâce à la solidarité des habitants d’un village et fait tache d’huile auprès des communes voisines.

L’émission, enrichie par du motion design, est mise en scène avec Louise Ekland, une présentatrice souriante et pêchue (ce qui ne l’empêche pas de poser des questions pointues). Elle ponctue ses interventions avec des mini sketches, un quiz (pour prendre conscience de l’ampleur des problèmes) ou des brèves JoSo autour de la thématique.

Bref, un concept complet. Et inspirant.

Vers des séries et des communautés

En dépit d’un groupe Facebook, la présence de « On a la solution ! » sur le web est assez discrète. Or le lien entre une communauté d’audience et le média est un formidable ciment pour renforcer, développer et pérenniser un concept JoSo. L’expérience de Nice Matin (voir épisode 9) est, à cet égard, exemplaire.

C’est ce lien qui est le fondement du projet de Sophie Roland. Avec l’appui du SJN, cette journaliste d’investigation convertie au JoSo travaille sur une série documentaire où la solution devient le cœur de la narration. « L’idée est de feuilletonner chaque mois pour montrer une expérience en action avec des personnages récurrents ». L’enjeu, c’est que chaque téléspectateur s’attache aux protagonistes et puisse s’inspirer de leur expérience. « Je suis obsédée par les changements comportementaux », explique Sophie Roland qui envisage de rencontrer sa communauté dans la vie réelle au-delà des réseaux sociaux « pour débattre dans des salles polyvalentes ».

Média de masse (et gratuit), la télé peut aussi déclencher un bel effet de souffle qui va au-delà de l’étonnement ou de l’indignation passive devant son écran…

De Brut à Tiktok

La vidéo passe aussi par les réseaux sociaux. Et c’est même le principal moyen de diffusion d’un média comme Brut. Ce média vidéo a fait du JoSo, un de ces programmes emblématiques.

  • « Un monde de solutions » regroupe des centaines de vidéos, du role model aux tutos. C’est efficace comme toujours avec Brut. Avec un story telling percutant et des scores impressionnant : certaines vidéos dépassent les dix millions de vues. Cette section de Brut a d’ailleurs tellement de succès que le média a décidé d’en faire… un livre : 100 actions, changer le monde.
  • Si on trouve des vidéos JoSo sur tous les réseaux, ça vaut le coup de jeter un œil sur TikTok. Le réseau préféré des ados regorge de trouvailles de « TikToktivistes » de la génération Z qui s’amusent à distiller des messages très pratiques et ludiques pour sauver la planète. On les retrouve sous le collectif EcoTok.  
  • Mention spéciale à Philip Aiken, alias Philthefixer, un redneck LGBT assumé qui attire 50.000 followers en expliquant comment stimuler la biodiversité dans son jardin. C’est court, drôle, efficace et très JoSo !

À méditer avant de filmer

  • Vous avez une histoire ? N’oubliez pas de trouver des images qui racontent le problème et pas seulement la solution : plage polluée, zone désertifiée, émeutes urbaines… Les archives sont un pilier du JoSo filmé.
  • Profitez de la caméra pour faire un tuto.
  • N’oubliez pas le Motion design pour appuyer l’impact de votre récit.

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