Journalisme & santé

13. Le journalisme santé de demain /

Nous voilà parvenus au terme de notre série sur le journalisme santé. Merci de nous avoir suivis. Pour terminer le parcours, pensons à l’avenir et envisageons les défis qui vont se présenter aux journalistes spécialisés en santé dans les prochaines années.

Sans nul doute, avec la multiplication des sources d’information, les infox vont continuer de se propager de manière exponentielle. Or, c’est dans le domaine de la santé qu’elles sont les plus virales. C’est là aussi qu’elles peuvent être les plus dangereuses. Qu’il s’agisse de cancer, d’autisme, de diabète ou encore de problèmes gynécologiques, les infox qui se propagent sur les réseaux sociaux amènent les patients à essayer de se soigner avec des produits aussi dangereux qu’inefficaces et à suspendre leurs traitements. Ainsi, le fact-checking et la lutte contre les fausses nouvelles sera une des missions principales du journaliste santé. Plus que jamais, et face à une défiance grandissante envers les médias traditionnels et les institutions sanitaires officielles, le journaliste santé devra être à même de vérifier les informations et d’étayer par des sources sûres ses propos de manière à réfuter sans compromis les rumeurs et autres propos complotistes.

Ce défi est à conjuguer avec un autre challenge : des temps médiatiques de plus en plus courts, favorisés par une numérisation croissante de l’information. N’importe quelle information, qu’elle soit vraie ou non, lancée sur Twitter, TikTok, We Chat ou Vkontakte fait le tour du monde en quelques secondes. Quelle posture adopter ? Se ruer sur l’information sans prendre le temps, parfois long, de la vérification ? Tout arrêter pour s’engager immédiatement dans un fact checking qui peut s’avérer fastidieux en vertu de la loi de Brandolini – « La quantité d’énergie nécessaire pour réfuter des idioties est supérieure d’un ordre de grandeur à celle nécessaire pour les produire. » ? Ou, privilégier le temps long ?

Ces questions se posent et se poseront dans toutes les rédactions et la réponse sera très variable d’un média à un autre. Il est possible que de nombreux médias web adoptent, à l’avenir, un traitement de l’information froid à l’instar de la presse papier magazine.

Il sera, à coup sûr, pertinent d‘investir de nouveaux formats comme le data journalisme et ses infographies, le journalisme immersif qui propose une gamification de l’actualité ou encore le journalisme collaboratif ou conversationnel qui se co-crée avec ses utilisateurs. On pensera aussi aux podcasts ou encore aux éphémères stories… L’information du futur sera plus que jamais multimédias.

Ainsi, il sera nécessaire d’être curieux sur la forme mais aussi sur le fond. En effet, et la pandémie de la Covid-19 nous l’a bien montré, l’intérêt pour l’information grandira en même temps que celle-ci va être amenée à se complexifier.

Plus technique, d’abord, ce qui demandera une meilleure formation des journalistes aux sciences et à ses enjeux ainsi qu’une plus grande collaboration des scientifiques afin qu’ils constituent de véritables ressources.

Plus globale aussi. Un intérêt accru pour la recherche et la médecine internationale pourrait augmenter la popularité des échanges culturels et permettre au public de mieux comprendre la dimension universelle de la recherche scientifique. Car aujourd’hui, l’information santé se conjugue à la fois au local et au global.

Nous pourrions conclure, enfin, sur l’importance de se positionner sur l’éthique du journalisme. Les journalistes santé ne devront pas devenir des « passe-plats » ou des porte-voix des scientifiques ou des institutions. Ils devront au contraire garder un scepticisme sain, ne pas faire de la science un dogme, mais toujours s’interroger, creuser, confronter, enquêter, contextualiser et citer leurs sources. Ils devront enfin s’abstenir de toute collusion financière ou politique. Promouvoir la bonne science est déjà un engagement en soi, mais il doit être dénué de toute idéologie.

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