Journalisme & fact-checking

01. Le fact-checking, qu’est-ce que c’est ? /

Le fact-checking ? C’est un ensemble de pratiques et d’outils qui permettent de vérifier une information. Les façons de faire sont nombreuses, et tout type de contenus peut faire l’objet d’une vérification (photo, vidéo, rumeurs partagées sur les réseaux sociaux etc.)

Mais d’abord, un petit rappel : le fact-checking est au fondement de la pratique journalistique. Un journaliste doit toujours effectuer un travail de vérification des faits avant de les publier. Il y a encore quelques années, l’exercice portait principalement sur la vérification des déclarations des hommes et femmes politiques. Mais du fait de l’explosion des infox, ou fausses nouvelles, souvent créées sur Internet et diffusées massivement via les réseaux sociaux, le fact-checking prend une place de plus en plus importante dans la pratique des métiers de l’information, et ce partout dans le monde.

Quand on sait qu’il y a aujourd’hui plus de 4,5 milliards d’internautes dans le monde, la masse de contenus publiés donne le tournis. Jugez plutôt : en une minute, près de 42 millions de messages sont échangés sur Whatsapp, 500 heures de vidéos sont publiées sur YouTube et 500 000 commentaires apparaissent sous des publications Facebook. L’irruption d’Internet, notamment grâce aux téléphones portables, a permis à de simples citoyens de se transformer en reporters du quotidien en diffusant photos et vidéos d’événements dont ils sont les témoins. Le problème, c’est que parmi tout le contenu partagé sur Internet, on trouve des informations fausses, ou méritant d’être étayées. Et même si c’est une infime partie de ce que les internautes publient dans le monde entier, le travail de vérification est colossal. La situation est la même dans tous les pays du globe : les fausses nouvelles frappent autant les États-Unis que les pays d’Afrique, elles se répandent autant en Europe qu’au Proche et Moyen-Orient. La situation connaît quelques particularités dans le monde arabophone, où le paysage médiatique, bien que très divers, reste dominé par des gouvernements autoritaires hostiles à la liberté de la presse. La population, déjà peu encline à faire confiance aux médias en règle générale, bénéficie tout de même depuis quelques années de chaînes de télévision satellitaires dotées d’une éthique professionnelle plus forte. Et Internet a permis à de nombreux acteurs d’émerger, dont des sites spécialisés dans le fact-checking. 

Mais dans des pays où les citoyens sont habitués à une forme de propagande médiatique, le travail des spécialistes du fact-checking est parfois compliqué, et peut s’apparenter à vider l’océan d’infox à la petite cuillère.

Le fact-checking est par ailleurs un exercice éreintant et de temps à autre répétitif, mais il est essentiel : parmi les fausses nouvelles, certaines ont un impact néfaste sur nos sociétés. Des anti-vaccins qui refusent des traitements essentiels aux théories du complot les plus farfelues, les fausses informations et leur diffusion sont au cœur de ce que certains experts appellent “l’ère de la post-vérité”. Celle-ci désigne une évolution de nos sociétés dans lesquelles l’émotion prend le pas sur la raison, et où les faits établis sont constamment remis en cause par une partie de la population qui utilise le Web social pour se faire entendre. Certains politiques en jouent, et ignorent les faits et la nécessité d’y soumettre leur argumentation. Et certains médias nourrissent à l’occasion cette nouvelle forme de confusion : quand Al-Jazeera et d’autres chaînes satellitaires n’apportent aucune contradiction à la propagande flagrante du ministre irakien de l’information Mohammed Saeed al-Sahaf au début de l’invasion américaine en Irak en 2003, elles facilitent la circulation de la désinformation et de fausses nouvelles dans l’écosystème arabe de l’information et dans le débat public.

À l’heure où scientifiques, universitaires et journalistes suscitent le rejet, toute information est sujette à caution. Les fact-checkeurs peuvent alors être vus comme les premiers combattants sur la ligne de front de l’info. Et parfois, ils sauvent des vies, comme lorsqu’il s’agit de restreindre la portée de fausses rumeurs partagées en Inde au sujet de gangs ravisseurs d’enfants qui conduisent à des lynchages. Ou de démonter les théories du complot très en vogue dans les pays arabophones : un sondage du Pew Research Center (PRC) estimait en 2011 que le complotisme autour du 11-septembre a beaucoup de force dans la région. Moins de 30% des personnes interrogées admettent que les attaques ont été perpétrées par des musulmans et arabes. Se donner les moyens de lutter contre les infox est donc un enjeu majeur du siècle à venir, comme le souligne le nouveau slogan adopté par le Washington Post : “Democracy dies in darkness” (la démocratie meurt dans l’obscurité).

Et cela tombe bien, puisque nous vous donnerons au cours de cette formation les éléments essentiels pour bien comprendre ce qu’est une infox et surtout comment les débusquer afin de les vérifier !

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